L'énergie de la musique, contre l'énergie extraordinaire du dessin de PICASSO
LE MYSTÈRE PICASSO
Un ciné-concert électroacoustique - Musique de FRANCOIS Régis, interprêtée par l'Ensemble ECCE
Ecrire une musique nouvelle pour « le mystère Picasso », c’est offrir un spectacle vivant.
En musicien, j’ai vu et revu ce film singulier. Le voir c’est l’aimer sans jamais le comprendre vraiment tant il échappe aux logiques cinématographiques habituelles.
Le film de Clouzot n’est pas un documentaire monographique ; c’est un film à suspens, virtuose, ambigu, le portrait complexe et contradictoire de Picasso. Le cinéaste montre le peintre génial, s’engageant physiquement dans son oeuvre, comme dans un combat. Il peint dans un faux direct, montre l’enchaînement des actions, depuis la toile blanche jusqu’au trait, au dessin, à la couleur enfin, dans une danse sans fin des formes. Le peintre renie parfois sa première intention, engage son dessin dans une direction avant d’en changer radicalement. Les deux artistes interrogent ensemble l’acte de création artistique, offrant aux spectateurs une expérience inédite : vivre 80 minutes avec un artiste en production où à chaque minute, le mystère s’épaissit, tant le processus de création importe autant que le résultat.
Notre proposition musicale est à cette image : elle crée « une petite flamme placée sous l’écran pour l’aider à s’embraser » (A. Copland). La partition s’engage dans une esthétique avant d’en contourner les codes, superpose des sons à priori contradictoires avant qu’ils ne se caressent. Les musiciens sont en direct, ils entourent le film, jouent avec lui. Cette version sonore du « Mystère Picasso » est un jeu sur l’espace de représentation, sur le temps qui fuit, la matière qui se transforme, et l’énergie dont font preuve Clouzot et Picasso à l’écran.
Filent des épisodes : les percussions délicates et endiablées, la clarinette caressante et mordante, le violoncelle profond ou lunaire, le piano enveloppant ou grinçant ainsi que les sons électroniques inédits réalisés en temps réel. Ils dialoguent entre eux comme ils parlent avec les images, en contrepoint. Ils leur donnent une autre dimension, une nouvelle respiration, prenant tout leur temps pour servir le film, le révéler dans sa modernité, faire spectacle.
Film d’Henri-Georges Clouzot
France | 1956 | 1h18
Avec Pablo Picasso, Henri-Georges Clouzot, Claude Renoir.
Restauration et numérisation avec le soutien du CNC.
« On donnerait cher pour savoir ce qu’il s’est passé dans la tête de Rimbaud pendant qu’il écrivait le Bateau ivre… » Tels furent les premiers mots d’Henri-Georges Clouzot pour commenter Le Mystère Picasso.
Ce film donne à voir l’exécution par Pablo Picasso de dessins et de tableaux, au moyen d’un procédé technique innovant qui se propose de lever le voile sur le mystère de la création de l’artiste.
Au printemps 1955, Picasso fait part d’une récente découverte à Clouzot : des feutres-pinceaux inventés par un graveur américain, trempés dans des encres spéciales.
Ces feutres et encres ont la propriété de traverser le papier sans baver et d’inscrire au verso les traits exacts dessinés au recto. Clouzot décide alors de filmer, non pas Picasso en train de créer, mais sa création elle-même, débarrassée de l’outil et de la main du peintre.
La caméra de Clouzot, cadrant la toile (un papier calque) du côté opposé à celui de Picasso restitue au public le geste artistique en transparence et, par là même, le cheminement de la pensée du créateur à l’œuvre. Puis, le film passe à la couleur : peintures à l’huile, plus classique, filmées en cinémascope image par image.
Lorsque Picasso peint à l’huile, la technique est différente. Clouzot place sa caméra derrière le peintre et photographie la toile à chaque évolution, tandis que Picasso s’écarte. Pour suivre fidèlement les proportions des toiles, le format de tournage s’adapte.
Ainsi, le film sera le seul à employer successivement le noir et blanc et la couleur, et deux formats (1,66 et scope).
Ensemble ECCE (Ensemble Création Collectif Éphémère)
– Formation TRIO
Clavier électronique / piano: FRANCOIS Régis
Electronique: Jean LOCHARD
Percussion: Cyril HERNANDEZ
– Formation QUINTETTE
Clavier électronique / piano: FRANCOIS Régis
Violoncelle: Stéphanie HUANG
Clarinette: Marek SVEKAR
Electronique: Jean LOCHARD
Percussion: Cyril HERNANDEZ
Prochains spectacles
14 janvier 2023 : HALL DE PARIS – MOISSAC (82) – 21H